Musique – Trek en pays Gurung – 22.12.13

Trek ou pas trek, telle est la
question.
Car je dois bien l’admettre, je ne suis
pas une fan absolue de la marche et de tout effort physique en
général.

Mais au Népal, le trek est
quasi-obligatoire.

Alors, je me résous à un faire un.
Mais lequel?
Les régions qui m’intéressent (en
particulier le Dolpo) demande un permis spécial de 500 dollars pour
10 jours et un groupe minimum de 2. Ce sera pour une prochaine fois.

Il reste les circuits classiques mais
je redoute la foule de touristes qui m’attend sur ces treks. (Et oui,
je continue de faire ma sauvage !)

L’option qui me reste est de m’adresser
à un copain d’un copain d’un ami voyageur. Je lui dis que j’aimerais
aller voir les Gurung et lui indique une région. Il est d’accord
pour m’accompagner.

Yam, c’est son nom, n’est pas vraiment
un guide. Il s’habille comme s’il allait à un meeting politique et
je crois qu’il déteste encore plus marcher que moi, si cela est
possible.

Mais il est conciliant, attentif et bon
camarade : c’est parfait pour moi.

Et c’est parti pour le trek express car
sur les 8 jours prévus nous n’en ferons que 5; Yam devra rentrer
sur Katmandou plus tôt que prévu.

Jour 1 : Je rejoins Yam dans la
ville de Dumré, entre Pokhara et Katmandou. On prend un bus local
qui prendra des routes défoncées et qui mettra 3 longues heures
pour faire.. 32 kilomètres. Record battu !

« Wanted »: tu m’étonnes…

Le bus ne va pas plus loin alors on
s’arrête et dormons à Boranj Khola dans une toute petite maison
d’une jeune veuve et sa fille. Pour 5 dollars, on est nourris-logés
dans une ambiance chaleureuse.

Jour 2 : Finie la rigolade, il
faut marcher maintenant.

Youpi….. (ironie).

Yam me dit qu’on va mettre 4 heures. Il
est 8h30, j’essaie de me motiver comme je peux. On longe la Chepee
River et on monte, on monte… je n’en vois pas le bout de cette
P***** de montée.

La femme-arbre

Chepee River

Surtout, le drame, c’est que je ne
trouve pas d’eau minérale en chemin et que ma bouteille d’eau
diminue à vitesse grand V. On traverse 2 villages, pas d’eau.
Seulement du Pepsi.. Je m’en contenterais à contre-coeur.

Dans la montée, je n’en peux plus, et dès
qu’on croise un jeune homme vaillant, on lui demande s’il peut faire
office de porteur contre rémunération. Il accepte, alléluia !
Le souci c’est qu’il dépensera aussi sec sa paye à la première
halte venue dans une énorme flasque de whisky qui boira dans un
temps record. Le gars était complètement bourré à 11h du mat. Et
au lieu de tituber, il galopait !! Incompréhensible.

Au bout de 5h30 de marche, on arrive
enfin. On a prévu de manger dans une école, à Kolki.

Une grande et belle école qui a été
construite grâce à des fonds anglais et qui tranche avec les écoles
que j’ai vu dans les villages.

Ecoles dans les villages:

Le proviseur de l’école de Kolki nous reçoit enchanté. Il
ne voit jamais de touriste dans son école et veut TOUT savoir sur moi et
devenir my best friend forever.

Je retrouve à peine mon souffle
qu’il me demande une faveur, mais vraiment si ça ne m’embête pas,
car ce serait un grand honneur pour lui si je pouvais.. donner un
cours sur la France à des élèves.

Alors, je m’attendais à tout sauf à
ça. Comment refuser une pareille requête ?

Il court chercher un globe terrestre et
me presse d’aller dans la classe 10, celle des plus grands.

Qu’est ce que je peux raconter de la
France à des jeunes népalais qui ne savent même pas où est
l’Europe ni vraiment ce que c’est..
Alors je me contente des basiques :
on a pas de mousson, on ne mange pas du riz tous les jours, on se dit
bonjour en se serrant la main, nos week-end durent deux jours (ici,
il n’y a que le samedi de chômé), on peut vivre avec un homme/une
femme avant le mariage, etc..

Je ne sais pas s’ils sont très sages
ou s’ils s’en foutent complètement, mais ils ne bronchent pas.

Ma première journée en tant que
professeur ne s’arrête pas là car je donnerais aussi un « cours »
dans les classes 8 et 9.

Puis le proviseur me demande dans une
des classes si je peux danser la danse traditionnelle de mon pays. Je
lui explique que nous n’avons pas de telle danse. Ça le rend dingue,
il comprend pas comment c’est possible. Il insiste et me montre son
pas de danse traditionnel à lui devant la classe qui éclate de
rire. J’esquisserais deux-trois mouvements de danse pour lui faire
plaisir. Mais rien de traditionnel là-dedans.

Mais décidément M. Dipak Bhatta veut
tester mes capacités artistiques car il me demande maintenant de chanter une
chanson en français devant la classe. Oups.. la boulette. Je chante
comme une casserole. Mais il ne s’en doute pas le bougre. Il ne sait
pas que ça va être une catastrophe acoustique.

Bon je me lance dans « frère
jacques », je sais que cette chanson est chantée partout. Elle
fera peut-être son effet.
Pas d’applaudissements pourtant
espérés à la fin de la prestation.

Mais au moins j’ai rempli mon contrat.

Sauf.. sauf qu’une jeune fille très
timide se lève et me demande si je peux chanter maintenant l’hymne
national de la France. Sûrement qu’elle a aimé la sonorité de ma
douce voix de rossignol du sud et qu’elle en redemande (ironie-bis).

Alors là, c’est la honte. La
Marseillaise je la domine mais alors c’est pas du tout dans ma
tonalité (ohhh genre la pro!).

Non, je sais d’avance que ça va être
un massacre.

Mais quand a pas le choix on fait comment? Et bien on y va, quitte à être ridicule. (Cette séquence a
été enregistrée dans la vidéo qui se trouve à la fin de
l’article si vous tenez vraiment à m’entendre..)

Ma journée de prof s’achève enfin. Je
suis claquée. Le proviseur insiste pour que nous dormions à l’école
ce soir. Ce sera avec grand plaisir. Les filles de classe 10 me feront une petite place dans leur
dortoir sommaire.

Deux problèmes cependant : pas
d’électricité et pas d’eau potable ici non plus.
Je ne compte pas me gaver de pepsi
(que j’aime pas en plus) et me résous à faire bouillir de l’eau en
priant pour que toutes les bactéries meurent à grands feux.
En même temps, il fait tellement froid
ici que les bactéries ne doivent pas être légion. C’est en tout cas ce que je me dis pour me rassurer.

Dans le dortoir avec les filles, je
passerais de très bons moments, je leur montre des photos, des
vidéos mais elles réclament quelque chose que je n’ai pas :
des photos de la France.

En tout cas, ce sont des bosseuses, et elles seront réveillées le lendemain
à 4h à coups de sifflets pour réviser leurs cours !
Faut dire qu’on rigole pas dans l’école
de M. Battha. Si vous ratez une journée de classe, c’est 60 flexions
mains sur la tête devant tout le monde. Si vous ratez une deuxième
fois, vous devez payer une amende de 200 roupies.
Une bonne façon de lutter contre
l’absentéisme.

Jour 3 : Je me lève
tranquillement, j’ai pas très bien dormi entre les coups de
sifflets, le froid et le lit trop dur. A peine mon thé du matin
terminé, les filles viennent me chercher. Elles m’avaient dit la
veille qu’elles allaient danser ce matin.

C’est raté pour la danse, sûrement
que je me suis levée trop tard. Mais elles tiennent absolument à
m’habiller de manière traditionnelle (elles ont visionné la vidéo
sur les Rana Tharu la veille, ça leur a sûrement donné des idées!)
et je vais dans une maison du village pour la transformation.

Je me laisse faire. On me déguise une
nouvelle fois. En Gurung cette fois-ci.

Je suis habillée. Et maintenant quoi ?

Maintenant, on repart à l’école
elles me disent !

Ahhh.. ok.. je sais pas bien pour quoi
faire.

Sûrement pour me payer la HONTE car je
reviens à l’école affublée ainsi en plein milieu du rendez-vous
matinal, devant 200 élèves.

Vous imaginez en Bretagne une japonaise
débarquer dans une école habillée en bigoudène ?

Donc vous avez une idée de comment on
m’a regardée quand je suis arrivée ainsi vêtue. (là aussi, vous
avez la séquence dans la vidéo…)

Le proviseur apparemment ravi de ma
nouvelle tenue me demande alors de dire quelques mots à l’ensemble
de l’école. J’évite le discours sur l’estrade de peu. Je me
contenterais de leur témoigner à tous de ma reconnaissance pour
leur formidable accueil.

C’est une grande et belle école. Que
je garderais longtemps dans mon cœur.
D’ailleurs ils rêvent d’accueillir des volontaires. Avis aux amateurs. Vous y passerez de merveilleux moments.

Avec les filles du dortoir de la classe 10

Le proviseur, extra: M. Dipak Bhatta

Après les au-revoir, on repart vers
notre nouvelle destination, un village au sommet d’une colline
voisine. On va dormir dans la famille d’un petit gars de l’école,
Manas Gurung alias babou comme tous les jeunes garçons au Népal.
On voit rien, on est dans les nuages.

2h15 pour aller dans son village. Et ça
monte encore.
En ce moment au cinéma, je crois qu’il y a un
documentaire qui marche bien. Le réalisateur a décidé
de montrer dans différents coins du globe dans quelles conditions
éprouvantes certains enfants vont à l’école.
Manas aurait pu faire partie du
casting. Tous les matins, et tous les soirs, 6 jours par semaine, il
fait ce trajet pour aller à l’école (lui met 1h45, soit 3h30 par
jour). Quelque soit le temps. Des chemins escarpés, une montée
épuisante : lui, le fait en tongs, n’a qu’une chemise malgré
le froid et a un sourire et un regard doux qui me fend le cœur. Pour
s’éduquer. Pour avoir droit à un avenir qui lui ressemble.
Il est intelligent Manas, c’est un
petit gars fort, indépendant, déterminé.
Il ne manque jamais l’école, il veut
être soldat pour l’armée britannique: l’élite ici.

Il réussira, j’en suis sure. Je lui ai
dit que dans 10 ans c’est chez lui que je logerais quand je viendrais
au Népal.

Je me le souhaite.

Manas 

Je logerais donc dans sa famille. Son
père a le même regard que lui. On n’y voit que de la bonté.
Sa mère est plus effacée mais fera
son possible pour que je sois bien.
Une famille Gurung en or.

Baou, le papa de Manas

Ici non plus, pas d’électricité ni
d’eau potable. À peine de quoi faire fonctionner une petite lampe à
l’énergie solaire. Des conditions de vie rudimentaires auquel
s’ajoute un froid hivernal.

De la viande de buffalo qui sèche

Les morveux au sens propre du terme.

Et pourtant, là encore, on sourit, on
danse, on chante.

Ma visite dans ce tout petit village
sera d’ailleurs l’occasion d’improviser une petite fête pour me
souhaiter la bienvenue.

Difficile de décrire l’ambiance. On
rit, c’est tout.

La « mother of community »,
sorte de maire, me harcèlera pour que je danse. Alors j’ai dansé.
N’importe comment. On s’en fout. On rit. Simplement.

(la séquence est aussi dans la vidéo,
note de l’auteur.. )

Jour 4 : Les nuages sont encore là
ce matin. J’ai du mal à me réveiller. On doit à nouveau marcher.
La « Mother of community » organisera une cérémonie des départs avec tika, collier de fleurs et écharpe blanche.

Mother of Community

Le père de Babou nous accompagne. On va dans le village du
beau-père de sa fille.

Sur le chemin, je me suis arrêtée dans un village que j’ai
beaucoup aimé. Okari, en tout cas c’est comme ça que ça se
prononce. Un village Gurung coloré où les visages ridés des femmes
et hommes Gurung parlent d’eux-mêmes.

Puis on marche encore une heure vers
notre destination du jour.

On entend là encore de la musique
émaner du village. On pose nos sacs et allons voir ce qui se passe.

On m’explique alors que cette fête
célèbre la fin du deuil d’une famille. Après avoir versé des
larmes pendant 2 mois, on peut enfin chanter et danser.

Et devinez-quoi ?? là encore,
bibi a dû danser.

Et même qu’on lui a mis de l’argent
dans son bonnet pour lui dire à quel point elle dansait super bien
(ironie-ter)
En fait, cet argent va là encore à la communauté du village.

Il y en a à qui on met de l’argent
dans un string, d’autres à qui on met de l’argent dans un bonnet !
Et je suis pas peu fière de faire partie de cette 2ème catégorie ! (là encore, magnifique séquence dans la vidéo)

Une nuit à me peler, j’ai mal au dos à
force de dormir sur du bois et les rats ont dansé aussi auprès de
mon lit.

Jour 5 : Le trek s’achève. J’ai
besoin d’une vraie douche chaude car je me demande à partir de
combien de jours la vie animale s’installe dans des cheveux sales !

Sur le chemin, enfin une vue claire

Perrette et le pot au lait

Cette journée se résumera à marcher
et à prendre 3 bus pour rentrer sur Katmandou.

Bus n°2, j’ai hésité avant de monter dedans, je vous assure..

Ce que le chauffeur du bus a collé dans son bus. Chaud pour le Népal je trouve!

Je vous épargne le récit où je
m’aperçois en descendant du dernier bus qui est parti depuis
5 minutes que mon téléphone y est resté à l’intérieur.

Encore une mission impossible :
prendre le premier taxi venu et rejouer la 1ere scène du film du
même nom pour slalomer dans le trafic et arrêter le bus un peu plus
loin pour récupérer le portable !

Voilà les amis. Pour une fois, j’ai
adoré marcher parce que c’est ce qui m’a permis d’aller à la
rencontre de ces gens fabuleux. Allez-y.

J’oublie volontairement beaucoup de
choses dans mon récit qui risquerait d’être trop long.

Pour la vidéo, je crois avoir fait des
efforts au niveau de la technique même si des améliorations sont évidemment nécessaires!
Pour le reste, j’espère qu’elle
vous plaira. Dites moi ce que vous en pensez. De la vidéo, pas de moi car pour mon image de marque, on repassera.. Pas coiffée, pas maquillée, cernée, séquences ridicules..

Car résonnent encore en moi les chants, voilà un titre qui résume parfaitement l’ambiance de ce trek.

Merci de me lire.


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Commentaires

  1. Avatar de Anonyme
    Anonyme

    Que du bonheur !
    tu devrai écrire à l'éducation nationale pour suggérer d'appliquer les mêmes règles pour diminuer l'absentéisme des élèves et pourquoi pas des profs.
    Et non nous n'avons pas de danse nationale !!!
    continu sur ta lancée et 1000 baisers

  2. Avatar de Anonyme
    Anonyme

    Ca me donne envie de prendre un AR pour le Népal…

    Merci de ce partage. Les séquences de la vidéo m'ont fait bien rire.
    Et tu ne chantes pas si mal! 🙂

    Eric

  3. Avatar de Unknown

    Une respiration dans cette période de fêtes obligatoires

  4. Avatar de Mimi bulle

    Mille merci! Et bonnes fêtes à tous.

  5. Avatar de Anonyme
    Anonyme

    Excellentes fêtes à toi aussi chère Mimi l'exploratrice!

  6. Avatar de Anonyme
    Anonyme

    En effet leurs méthodes éducatives sont sans faille 😉

    Ton séjour est profondément humain!

    I always love your pictures

    Bonne continuation ma choupinette

    Love xoxo

  7. Avatar de Anonyme
    Anonyme

    Bonjour Mimi,

    Je pars au Népal en Septembre, et jai lu tous tes posts sur le Népal..
    J'aimerais faire un trek aux pays des Gurung aussi…Je te serais très reconnaissante si tu pouvais me donner plus d'infos sur la personne qui a fait de guide pendant ton trek (moyen de la contacter surtout)…afin de ne pas passer par une agence de trek.
    Merci beaucoup, et felicitations pour ton blog 🙂 jaime beaucoup.
    P.H

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